Présentation des outils de protection du patrimoine géologique
La notion de patrimoine géologique
Patrimoine géologique : s’applique à tous les objets de la géologie auxquels on attribue une valeur scientifique, historique, éducative, ou esthétique et dont on estime que pour ces valeurs, ils méritent d’être recensés, portés à la connaissance de la société et préservés pour le bien des générations futures. Il peut concerner des sites dans la nature (patrimoine in situ) ou des musées et collections (patrimoine ex situ). Le terme géologie est ici à prendre dans son acceptation la plus large englobant tous les objets et sites qui symbolisent la mémoire de la Terre, et inclut donc différentes disciplines que sont la paléontologie, la minéralogie, la tectonique, la géomorphologie …
Aujourd’hui la conservation et la gestion de ce patrimoine sont devenues un objet de préoccupation mondiale. Au niveau national, cela s’est traduit en 2007 par la création de l’Inventaire national du patrimoine géologique (INPG) pour favoriser la mise en place de politiques de gestion et de valorisation adaptées. Institué par la loi du 27 février 2002 relative à la Démocratie de proximité, reprise à l’article L. 411-1A du code de l’environnement, l’inventaire a pour objectifs « d’inventorier et de hiérarchiser les sites géologiques les plus remarquables de France » (De Wever et al., 2006), Cette tâche est réalisée par chaque direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), en association avec les commissions régionales du patrimoine géologique (CRPG), sur la base d’une méthodologie nationale. L’INPG constitue ainsi un élément majeur de la politique de connaissance et de prise en compte de la nature.
L’important, mais fragile, patrimoine francilien
Les études géologiques réalisées dans la région parisienne ont commencé dès la fin du XVIIIe siècle en cartographie et en paléontologie. Au XIXe siècle, des illustres auteurs comme A. Lapparent, G. Cuvier, G. Dollfus, A. Brongniart, G.P. Deshayes, et A. d’Orbigny élaborent les bases de la géologie à travers les concepts de la paléontologie, de la sédimentologie et de la stratigraphie grâce à la description des fossiles du Bassin parisien et de l’étude des formations géologiques de cette région. De nombreux travaux scientifiques (thèses, livres, articles), ainsi que des guides géologiques régionaux ont été publiés sur les formations sédimentaires du Cénozoïque du Bassin parisien.
A partir des années 1970, face notamment à la pression urbaine de plus en plus importante, la communauté scientifique prend conscience de la question de la détérioration des sites géologiques et la nécessité de faire un état des lieux de la connaissance du patrimoine géologique francilien (Iaurp, 1975 ; Viette, 2000, 2005, 2007). Suite à la loi relative à la démocratie de proximité, affirmant la nécessité de conduire des inventaires du patrimoine naturel et géologique, un pré-inventaire est réalisé par Elise Auberger de 2014 à 2018, dans le cadre de ses travaux de doctorat (Auberger, 2018) à l’échelle de l’Ile-de-France. Ce travail permet d’identifier les sites géologiques et de comprendre leur répartition spatiale afin d’identifier les formations géologiques menacées en vue de faciliter leur conservation. Un total de 705 sites de natures différentes sont compris dans cette liste (carrières, géosites, karsts, sources, panorama, musées publics et collections d’associations) ce qui souligne la grande géodiversité de la région. Cette liste a ensuite été affinée par 3 vagues successives d’inventaires, permettant de réaliser un diagnostic sur le terrain afin de retenir les sites à inscrire dans l’inventaire national du patrimoine géologique (INPG) : à ce jour, celui-ci se compose de 192 sites géologiques, chacun faisant l’objet d’une fiche descriptive et d’une évaluation de son intérêt patrimonial (trois, deux, une, ou zéro étoile). Ces sites inscrits à l’inventaire sont le témoin du concept originel de plusieurs notions en géologie (stratigraphie, sédimentologie) introduites au cours du XIXe siècle, des variations environnementales et climatiques passées, et de l’exploitation de la pierre par l’homme. Cet inventaire n’a pas vocation à être un simple bilan, témoignage pour les générations futures d’un patrimoine disparu ; il constitue une aide active à l’élaboration de la politique publique de protection du patrimoine naturel de l’Etat et des collectivités territoriales.
La modalité de mise en œuvre de la protection du patrimoine
La stratégie nationale de création des aires protégées (SCAP), voulue par le Président de la République suite aux accords de Kumning-Montréal, vise notamment à classer en aires protégées 30% des écosystèmes terrestres et marins français dont 10% en protection forte. Cette stratégie nationale fait l’objet de déclinaisons régionales. En Ile-de-France, l’identification des sites ayant vocation à bénéficier de protections fortes repose sur un travail d’analyse scientifique approfondi qui a ensuite fait l’objet en 2023 d’une large concertation pilotée par les préfectures et les DDT à l’échelle de chaque département.
La Stratégie nationale de création des aires protégées prévoit en outre explicitement que l’ensemble des départements devront avoir protégé leurs sites d’intérêt géologique d’ici 2030. Aussi, la DRIEAT, en étroite collaboration avec les DDT, travaille sur un projet d’arrêté préfectoral listant (et protégeant) plusieurs sites d’intérêts géologiques au niveau de chaque département francilien.
Présentation des outils de protection
Afin d’assurer la préservation du patrimoine géologique, la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement instaure un statut de protection spécifiquement adapté aux enjeux des sites géologiques. Il se traduit, conformément au décret n°2015-1787 du 28 décembre 2015 relatif à la protection des sites d’intérêt géologique, par deux outils de protection (articles R.411-17-1 et 2 du Code de l’environnement) :
• L’arrêté préfectoral listant les sites d’intérêt géologique au niveau départemental faisant l’objet d’une protection au titre de l’article L. 411-1 du code de l’environnement (articles R.411-17-1-I du code de l’environnement) ;
• L’arrêté préfectoral de protection de géotope (APPG) concernant des sites identifiés sur les listes départementales (article R.411-17-1-III du code de l’environnement) fixant toutes mesures de nature à empêcher la destruction, l’altération ou la dégradation des sites.
Ces deux outils de protection relèvent de la compétence du préfet de département.