Les eaux pluviales sont-elles polluées ?

Ce qu’il faut retenir :
Les eaux pluviales ne sont initialement pas polluées et peuvent être dans la majorité des cas infiltrées sans traitement. Elles se chargent en polluants en lessivant les sols et bâtiments. Le problème de « pollution » des eaux pluviales n’est pas la pollution directe qu’elles transportent, mais bien le fait qu’elles fassent déborder les réseaux d’eaux usées. C’est pourquoi il faut favoriser l’infiltration et la gestion à la source.

En revanche, pour lutter contre la pollution liée au lessivage des surfaces, les eaux pluviales peuvent être infiltrées sans danger si :

  • le parcours de l’eau a été réduit au maximum ;
  • il n’y a pas de source identifiée de pollution importante (trafic peu important, utilisation de matériaux durables, de pesticides/fongicides sur les toitures ni sur les espaces publics et privés, etc.) ;
  • les eaux pluviales sont infiltrées de manière diffuse (ie. pas de puits d’infiltration par exemple). Il n’y a alors pas lieu de réaliser un traitement complémentaire à celui déjà assuré par le sol d’infiltration (ni déshuileur-débourbeur, ni tout autre ouvrage spécifiquement dédié à un traitement), c’est le cas le plus fréquent.

Enfin, les risques de pollution accidentelle doivent être anticipés mais ne doivent pas systématiquement remettre en cause les principes de gestion à la source. Dans un projet, il est rare que toutes les eaux pluviales soient susceptibles d’être polluées !

Pour aller plus loin

La pollution des eaux de ruissellement urbain est un concept qui a maintenant été bien intégré par les acteurs de la ville. Cependant ce concept est souvent mal compris et différents éléments sont confondus à tort. Il est ainsi important de bien distinguer les différents types de pollution.

Pollution de l’eau de pluie
L’eau de pluie est naturellement polluée. En effet les gouttes d’eau ne peuvent atteindre une taille suffisante pour tomber vers le sol que s’il existe des particules solides dans l’atmosphère permettant d’initier le processus de nucléation. Une partie des polluants atmosphériques urbains sont donc entraînés vers le sol lors des périodes pluvieuses. Les concentrations en polluants sont cependant extrêmement faibles. Dans la plupart des situations l’eau de pluie est de très bonne qualité lorsqu’elle arrive au niveau du sol, et heureusement car cette eau va reconstituer notre ressource. Le facteur limitant le plus fréquent est le pH (pluies acides), mais cette acidité est très rapidement tamponnée par les matériaux sur lesquels elle ruisselle ou qu’elle traverse.

Pollution des eaux de ruissellement pluvial
En arrivant au sol, l’eau de pluie va d’une part lessiver les surfaces sur lesquelles elle s’écoule et d’autre part éroder les matériaux de surface. Les contaminants peuvent soit être dissous, soit être fixés sur les particules entraînées par l’eau. L’augmentation de la concentration en polluants dépend de facteurs multiples : intensité de la pluie, importance des ruissellements, nature du matériau de surface, nature des activités sur ou à proximité de la surface, etc… Ceci explique la très grande variabilité des concentrations trouvées dans la littérature.

En pratique, le facteur le plus important reste cependant la distance parcourue par l’écoulement. De façon assez basique, si la goutte d’eau parcourt plusieurs dizaines de mètres pour rejoindre un avaloir, elle se chargera beaucoup plus en polluants que si elle s’infiltre exactement là où elle est tombée et ne traverse que quelques centimètres de matériaux potentiellement pollués ou érodables. Ceci est encore plus vrai si elle passe par un caniveau où les polluants s’accumulent.

Pollution des rejets pluviaux stricts
Dans un système d’assainissement séparatif classique, les eaux de ruissellement sont recueillies dans un réseau de surface (caniveaux), puis introduite dans un réseau souterrain de conduites et acheminées le plus directement possible vers un exutoire de surface (cours d’eau). La pollution des rejets pluviaux stricts correspond à la pollution mesurée à cet exutoire.

La qualité des rejets pluviaux stricts est bien plus mauvaise que celle des eaux de ruissellement. En effet l’eau se charge en polluants tout au long de son parcours :

  • dans les caniveaux, où les pratiques de nettoyage des rues et les modes de vie des citadins accumulent les polluants ;
  • dans le réseau de conduites, qui reçoit par temps sec de multiples résidus, en particulier le produit du nettoyage des rues et des places de marché ainsi que les déchets divers déposés sur la voirie qui arrivant dans les avaloirs de rues.

Pollution des rejets urbains de temps de pluie
Dans les villes françaises, de nombreux réseaux unitaires (eaux usées et eaux pluviales) existent, notamment dans les centres urbains historiques. Comme toutes les eaux pluviales sont raccordées au réseau, celui-ci devient très rapidement saturé, dès les petites pluies, et déborde directement dans la rivière. C’est un rejet direct d’eaux usées au milieu naturel. C’est l’une des plus grandes sources de pollution actuelle de nos cours d’eau.

De nombreuses villes ou quartiers périphériques présentent des réseaux séparatifs – un réseau pour les eaux usées qui va à la station d’épuration et un pour les eaux pluviales qui va au milieu naturel – voués à résoudre ces problématiques de déversements au milieu naturel. Mais lorsqu’ils existent, la séparation des eaux usées et des eaux pluviales est rarement réalisée de façon parfaite (plus de 10% des branchements sont mal raccordés). Cela signifie que les rejets de ces réseaux pluviaux ne sont généralement pas des « pluviaux stricts », mais des mélanges d’eau usée et d’eau pluviale arrivant directement au milieu naturel.

Pollution accidentelle
Le risque de pollution accidentelle doit être caractérisé : déversement de produits chimiques, accident de la route, incendie, etc. Dans le cas où un risque avéré est mis en évidence, il est demandé :

  • de dissocier les eaux susceptibles d’être contaminées de celles qui ne présentent aucun risque ;
  • de ne pas avoir une perméabilité trop élevée afin d’assurer un temps de réaction suffisant pour une intervention (< 10-3 m/s ; pouvant être assuré par un amendement de terres végétales) ;
  • d’avoir une distance minimale entre le fond de l’ouvrage d’infiltration et le niveau de la nappe d’au moins 1 m (chronique de mesures piézométriques suffisamment longue) ;
  • de prévoir la possibilité d’isoler les eaux de ruissellement polluées (par la mise en place de vannes ou ouvrages de contrôles, etc.) si cela est justifié.

Consulter également la question "Existe-t-il un risque de pollution accidentelle des sols et des nappes phréatiques?"

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